Le 10 février dernier, j’ai été reçu pendant deux heures par le Président de l’Arcep… A cette occasion, l’Arcep a émis un communiqué lapidaire… qui mérite sans doute quelques compléments d’information.
Le 24 janvier dernier, la CFE-CGC & l’UNSA Télécoms ont demandé à l’Arcep l’ouverture d’une procédure d’enquête, afin de vérifier que Free Mobile répond réellement à ses obligations réglementaires en matière de couverture de son réseau mobile. L’attribution de la 4ème licence 3G lui a en effet été consentie sous condition de couvrir 27% de la population française en voix mobile via son propre réseau.
Qu’avons-nous appris lors de ce RDV ?
Notre démarche dérange, et l’Arcep fait des réponses « mi-chèvre, mi-chou », indiquant simultanément qu’elle va refaire des mesures du réseau Free Mobile, mais se défendant bien de le faire suite à notre demande (qu’elle semble juger incongrue), et se défaussant sur de fausses comparaisons historiques ou sur le contrat passé avec Orange pour laisser entendre qu’il n’y aurait aucun problème relevant du « gendarme des télécoms » concernant le réseau Free Mobile.
Quelle n’a pas été notre surprise d’apprendre comment étaient faites les mesures de couverture des réseaux mobiles par le régulateur ! Le matériel utilisé est en effet… un simple téléphone mobile, dont on regarde s’il capte le réseau de l’opérateur sur les points de couverture étudiés. Et c’est tout. La capacité du réseau à tenir la charge en exploitation (acheminement de plusieurs appels en simultané) n’est donc jamais testée. Aucune métrologie, aucun dispositif technique spécifique, tel qu’un équipement muni de plusieurs cartes SIM permettant d’envoyer plusieurs appels simultanés vers le même réseau, n’est donc utilisé par l’Arcep. Qu’en sera-t-il des mesures faites (si elles le sont) par l’Agence Nationale des Fréquences sur la demande d’Eric Besson ? Mystère !
En attendant, l’incident intervenu le 14 février sur le réseau d’Orange tend à confirmer que le réseau de Free Mobile ne prend pas sa part des appels émis par ses clients, 97% du trafic des clients Free Mobile étant acheminés par le réseau d’Orange.
En tout état de cause pour l’Arcep, c’est à Orange et Free Mobile de s’arranger entre eux ! La question n’est pourtant pas le contenu du contrat, ni ce que Free Mobile paie à Orange pour acheminer son trafic. La question, c’est que ce contrat ne peut exister que si Free Mobile remplit ses obligations de couverture, ce sont les conditions mêmes de l’obtention de sa licence 3G. L’Arcep ne peut donc ni inverser l’ordre des obligations, ni se défausser de son rôle de contrôle, qu’elle est en l’occurrence seule à pouvoir exercer. L’audition conjointe de Free Mobile et d’Orange permettra-t-elle d’éclaircir définitivement ce point ?
La position de l’Arcep pose un double problème par rapport au droit de la concurrence en France. Non seulement de laisser fonctionner le cas échéant un contrat d’itinérance illégal. Mais également de favoriser l’entrave à la concurrence, si elle définit que la terminaison d’appel en faveur de Free Mobile s’appliquerait sur tous les appels émis par les clients Free Mobile, y compris ceux transitant par le réseau d’Orange.